Éleveur - Président du syndicat mixte de l’abattoir de Quillan
Lieu d’activité : Quillan, Cailla
Thématique : Élevage, Économie
J’habite hors PNR, en limite. Je pose la question de la limite et la question des territoires oubliés. Le plateau de Sault n’est pas concerné par le futur Parc ; c’est un petit territoire qui va se retrouver isolé entre le PNR des Pyrénées Ariégeoises, le PNR des Pyrénées Catalanes et le futur PNR Corbières-Fenouillèdes.
Nous sommes installés en GAEC à trois, avec ma compagne et un ancien salarié. Notre activité s’articule autour de l’élevage bovin allaitant en race Gascogne, 60 mères, quelques poules pondeuses, quelques porcs et moutons, nous avons aussi une activité d’accueil en chambres et tables d’hôtes sur la commune de Cailla.
Je suis maire de Cailla, vice-président de la Communauté des communes des Pyrénées Audoises, chargé de l’agriculture et de la forêt, vice-président à la Chambre d’agriculture, chargé de l’élevage, et je suis président de l’organisme de sélection nationale de la race Gascogne, race endémique des Pyrénées. Je suis très attaché à valoriser les ressources de notre terroir.
Être bien dans sa peau, être bien dans sa tête, c’est souvent lorsque que l’on vit sur un territoire que l’on aime.
Cela passe par une attention à être bien ensemble, ici la population est hétéroclite, la communauté de vie est plutôt bienveillante et en attention à chacun.
J’ai la chance de faire un travail que j’aime, ma génération a été poussée à quitter le territoire, un territoire appauvri par la chute du secteur d’activité économique.
L’élevage est encore un secteur où l’installation est dynamique, mais il faut mettre en place des programmes qui permettent à des agriculteurs jeunes de s’installer sur des espaces viables ; on ne peut pas leur proposer de s’installer sur des cailloux.
Je suis président du syndicat mixte de l’abattoir de Quillan, il regroupe 116 communes. Nous sommes propriétaire du bâtiment et avons la gestion du bâti et du matériel, c’est une EURL qui gère l’outil et l’équipe de salariés. C’est un outil en perpétuelle évolution, nous devons régulièrement mettre aux normes l’infrastructure.
180 éleveurs de proximité amènent leurs bêtes, la production et la vente se fait essentiellement en circuit court, bovins, ovins, porc, chevreaux ; l’abattoir de Quillan est un outil de service autant qu’un outil de développement pour le territoire.
L’emploi est un des premiers problèmes sur notre territoire, on manque de dynamique d’emploi ; les personnes qui s’installent sont plutôt des retraités, des étrangers. Cependant il y a un certain dynamisme dans le tourisme et l’agriculture et des démarches individuelles parfois très intéressantes qui créent de toutes petites entreprises à l’échelle d’une famille et qui participent à la reconquête économique.
Axat a su garder tout un corps de services et de commerces, une maison de santé, le SMUR de Quillan… le maintien de tous ces services est essentiel pour garder une dynamique.
La diversité des paysages est ici une force. J’aime ces paysages, mais oui c’est ingrat pour l’agriculture, tout est en pente, boisé, ce n’est pas mécanisable, mais c’est sauvage, authentique.
On a beaucoup de visiteurs mais pas à la hauteur de la qualité de notre patrimoine. J’espère que le Parc, le classement UNESCO, vont booster la venue de touristes, apporteront une visibilité internationale comme celle que peut avoir la Cité de Carcassonne par exemple. J’ai beaucoup d’espoir dans le Parc pour créer cet appel et enclencher une dynamique économique.
C’est l’agriculture qui entretient les paysages, au fil des dernières années les agriculteurs ont disparu, les milieux se ferment. L’ouverture et l’entretien des milieux sont essentiels. Un milieu qui se ferme, cela n’attire plus personne… J’ai participé à reconquérir des parcelles, par mon travail d’éleveur. Cette reconquête est une des plus belle victoires qu’il faut poursuivre.
Au niveau de la filière bois, nous avons un massif forestier important. Il pourrait y avoir un pôle plus important dans le secteur de la transformation, et ainsi valoriser cette matière première sur notre territoire et devenir une force de création d’entreprises de proximité.
Les grands bouleversements du paysage ? Ici c’est peut-être les carrières de Sainte-Colombe, mais c’est des blessures qui à l’échelle de l’humanité vont se résorber… comme une route, une piste forestière, qui défigurent un temps mais, au bout de trois quatre années, un nouvel équilibre se fait.
Il ne faudra pas que le Parc impose trop de contraintes, il faut qu’il soit un maillon du développement local.
Il faut veiller à ce que des règlements stricts et sévères n’entravent pas l’activité agricole et touristique, que l’on se sente sous tutelle, que l’on ne laisse pas la place à des démarches trop extrémistes. L’important c’est composer, réfléchir, analyser les impacts et parfois faire des concessions.
Le Parc sera sans doute une force, cette labellisation sera un plus, mais « la vue sur nos beaux paysages » ne fait pas tout… Si c’est juste pour mettre un logo de plus, ça n’a pas d’intérêt, il faudra que cela soit un vrai outil.
Cela fonctionnera par la détermination et la bonne organisation du Comité de pilotage et la performance des techniciens du Parc. L’important c’est le terrain, c’est aller au contact des gens qui font le territoire.
Il faudra accompagner, soutenir les activités, valoriser et générer de la plus-value. Il faut que les gens d’ici puissent vivre aussi bien qu’un citadin… il ne suffit pas de vivre dans un bel environnement, si on crève la dalle… l’économie, c’est important.
Le parc pourra soutenir la recherche des nouvelles technologies innovantes.
J’espère que de nouvelles personnes vont arriver sur le territoire avec de nouvelles envies, de nouvelles idées, le Parc pourra y participer.